Loi Thévenoud : un décret inquiétant

L’intersyndicale des chauffeurs de taxis de France réagit suite à la proposition des modifications réglementaires présentées par le Ministère de l’Intérieur. De nombreuses modifications sont nécessaires sans quoi ces textes seront inacceptables (nouvelles contraintes pour les taxis !) ou inapplicables (en ce qui concerne les VTC).

Paris, le 5 décembre 2014

Monsieur COSTES(conseiller pour l’Administration Territoriale, Ministère de l’Intérieur),

Suite à notre réunion voici une première série de remarques et de questions que nous souhaitons vous soumettre.

TPE

Nous nous interrogeons sur  cette contrainte qui serait une première en France. L’industrie du taxi n’a pas attendu une mesure coercitive pour se moderniser et développer cet outil mais c’est au chauffeur de taxi de juger selon son type d’activité si cela est nécessaire ou pas.

Nous sommes par contre opposés à cette nouvelle disposition introduite par les projets de décrets qui voudraient que le TPE soit « connecté » au compteur. Cette notion de « connexion » n’est en effet pas abordée ni dans le rapport Thévenoud ni dans la loi. Les taxis n’accepteraient pas cette mesure arbitraire qui engendrerait de plus le renouvellement de tous les taximètres (suppression du 2° du II de l’article R. 3121-1).

 Relais

La création et l’utilisation des relais doivent se faire dans la transparence pour permettre un contrôle strict des autorités car des dérives ont déjà été constatées et des relais sont devenus des taxis « bis » (exploités en même temps que les véhicules censés être indisponibles). Le décret devra préciser les modalités de mise à disposition de ces relais afin d’éviter tous les abus.

 Contrat final

Cette notion reste encore trop floue et il semble indispensable de préciser que ce contrat ne peut être que l’objet d’une seule course réservée à une heure précise. Il serait bon de réaffirmer que la présence des VTC sur la voie publique en attente de cette réservation ne pourra excéder 30 minutes avant l’heure du dit « contrat final ». Ce contrat final devra par exemple préciser le nom du chauffeur, l’immatriculation du véhicule, l’identité du client, l’heure et le lieu précis de la réservation ainsi que la destination finale.

De même certaines interprétations laissent entendre que le contrat final existerait de manière perpétuelle à la fois entre le chauffeur VTC et l’éditeur d’application (au moment de leur engagement mutuel) et également entre l’intermédiaire et/ou les chauffeurs et des clients qui auraient souscrit une offre de transport.

Nous regrettons également que les notions de réservations, notamment dans le caractère préalable et ponctuel qu’elle devrait impliquer, ne soient pas définies clairement dans le décret. Cela laisse bien entendu le champ libre à toutes les interprétations. C’est pourquoi nous vous demandons de clarifier cette notion de contrat final et de réservation.

Signalétique VTC

Les VTC (comme les LOTI d’ailleurs) doivent être identifiables de manière permanente par les forces de l’ordre au risque de rester incontrôlables. Il leur suffit en effet de décoller leurs signalétiques actuelles afin de stationner en toute impunité sur la voie publique alors qu’ils sont justement en quête de clientèle. Une fois le client dans le véhicule, racolé ou via application, il leur suffit alors de recoller leurs signalétiques spécifiques. Ce sont des procédés actuellement utilisés par les VTC et l’article R3122-8 légitime cette manipulation qui reste un contournement de la loi.

Nous vous demandons donc d’introduire dans le décret d’une part l’apposition d’une signalétique inamovible pour les VTC/LOTI (il existe des autocollants « indécollables » qui évitent la fraude) d’autre part il convient de considérer ces véhicules comme étant en service dès lors qu’ils sont sur la voie publique. Sans cela, ils resteront invisibles pour vos services.

Dans un souci de contrôle et de sécurité Il conviendrait également d’imposer aux VTC une carte grise française.

Coresponsabilité prévue dans la loi 2014-1104

La coresponsabilité indispensable et bien soulignée par le député Thévenoud dans sa volonté d’impliquer tous les maillons de la chaine de transports (art. 10 de la loi 2014-1104). Il semble qu’il y ait un vide sur les sanctions prévues en cas de manquement à la législation notamment pour toute personne qui apporte son concours à l’organisation ou à la vente d’une prestation de transport (art. L3120-3 issu de la loi 2014-1104).

Nouvelles contraintes pour les taxis

L’article R 3121-10 risque de spolier les titulaires d’autorisations (ADS) acquises à des coûts importants puisque les autorités seront libres d’imposer des contraintes majeures (choix du véhicule, PMR, horaires,…) qui changeront la nature initiale de l’ADS. C’est un débat jamais abordé avec le député Thévenoud ni par les parlementaires, tout comme la connectivité d’ailleurs. Il faut donc supprimer cet article qui transforme la nature de l’ADS.

Sanctions

Nous souhaiterions que le stationnement illégal sur les emplacements de taxis et l’usage illégal des voies de bus soient sanctionnées par des amendes de 5ème classe. De Lille à Marseille en passant par Paris, les sanctions actuelles ont malheureusement démontré leurs inefficacités, ce qui nécessite des mesures dissuasives. Les amendes de 5èmes classes devraient répondre à ce besoin de préserver ces espaces pour les usages d’intérêt public auxquels ils sont destinés.

En règle générale, il conviendrait également de mieux harmoniser les différentes sanctions et contraintes entre les différents modes de transports. Pourquoi les motos seraient exonérées de contrôle technique annuel (art. 3123-5)? Ne transportent-elles pas des passagers quotidiennement comme les taxis ? D’ailleurs il est incompréhensible que ce mode de transport par la nature des risques qu’il fait courir à ses passagers ne soit pas plus contrôlé qu’un particulier !

Examens

Comment le VTC peut aujourd’hui prétendre se positionner comme un service haut de gamme alors que les chauffeurs de VTC ne passent même pas d’examen ? C’est une aberration et une contradiction de plus, surtout quand on sait que les chauffeurs de taxis, eux, doivent assimiler un programme complet durant plusieurs mois d’études, sanctionné par un examen. L’examen doit donc être un passage obligatoire pour les VTC.

Affichage des listes d’attentes

A la fin du V de l’article R. 3121-14 il conviendrait de remplacer le « ou » par « et » afin que les lois soient disponibles à la fois sur le site internet de l’autorité mais également affichée à son siège.

Location gérance

Concernant ce mode d’exploitation, nos organisations ne comprendraient pas que l’état n’ait pas son mot à dire sur les prix qui seront appliqués dans la mesure où c’est l’état lui-même qui fixe les tarifs taxis. Sans cela, les chauffeurs seraient de nouveau sous le joug d’une location esclavagiste aux tarifs sans rapport avec l’activité des chauffeurs.

Enfin, nous regrettons que rien ne soit prévu pour que cesse les immatriculations de VTC/LOTI/Motos. Cette accumulation de transporteurs ne peut qu’amener à la précarisation de tout un secteur avec au final, le résultat inverse de celui recherché. Nous vous demandons donc de rajouter un article qui permettrait de contrôler le nombre des acteurs du transport en France.

Dans l’attente de se rencontrer pour éclaircir ces sujets, nous vous transmettons, Monsieur COSTES, nos salutations distinguées.

Projet de décret loi taxi VTC- cliquez-ici

 

lettre costes décret-cliquez ici