La Commission du développement durable et de l’aménagement du territoire doit examiner demain Mercredi 25 Juin, le projet de loi de Thévenoud concernant les taxis et les Voitures de Tourisme avec Chauffeur (VTC). Notre organisation, la Chambre Syndicale des Cochers Chauffeurs CGT-Taxis souhaite vous faire part de ses remarques sur cette proposition et nous ne vous cachons pas que cette loi, telle qu’elle est aujourd’hui, ne pourra pas assainir le secteur.
Nous avons respecté la présentation qui était celle du texte de la proposition de loi mais nous vous rappellons que notre urgence est bien de mettre fin à l’exercice illégal de l’activité de taxi par les VTC, entre autres.
TAXI
- Open data (article 1er de la proposition de loi, article L. 3121-11-1 du code des transports)
Nous regrettons le caractère facultatif de l’open data puisque la transmission des informations (disponibilité et localisation) sera facultative. C’est d’ailleurs en contradiction avec le rapport Thévenoud qui préconisait « l’obligation de figurer dans la base de données » (proposition n°1).
Ce qu’il manque : la création d’une application nationale qui aurait exploité pleinement l’open data dans un véritable souci de servir le public.
- Location (article 3 de la proposition de loi, article L. 3121-1-2 du code des transports)
Cet article va abroger la location, ce qui constitue un acte fort longtemps revendiqué par notre syndicat. Par contre, le député ne va pas au bout de sa démarche car en laissant le choix de la location gérance nous craignons que la situation ne s’améliore guère pour les locataires dans la mesure où l’Etat n’aura pas de prise sur les prix de cette location. Dans ce contexte, notre syndicat estime que seuls les statuts de salarié et de travailleur indépendant titulaire de sa licence (dit « artisan ») permettent de vivre dignement de l’activité de chauffeur de taxi.
Ce qu’il manque : l’organisation d’une table ronde pour rendre la convention collective attractive.
C.Délivrances de licences incessibles (article 4 de la proposition de loi)
Il convient d’abord de préciser que la période actuelle ne permet pas la création de nouvelles licences. Le contexte économique et la création anarchique des VTC ont précarisé toute l’industrie du taxi.
Par contre il est évident que le retour à l’incessibilité d’éventuelles nouvelles licences ainsi que la révision des critères d’attributions assainiront le secteur. Dans le même esprit de justice sociale, il faut exclure des listes d’attentes les chauffeurs déjà titulaire d’une ADS (soit en propre, soit par le biais de l’actionnariat, parts sociales,…). Nous sommes certains que vous comprendrez l’importance de cette mesure.
Ce qu’il manque : la mise en place de véritables outils statistiques pour connaître la réalité de la situation des différents acteurs du transport, ce que M. Thévenoud a également constaté.
- Incompatibilité exercice Taxi/VTC (article 5 de la proposition de loi)
Le député rappelle justement qu’un chauffeur de taxi doit exploiter l’ADS de manière effective et continue, ce qui est incompatible avec l’exercice de l’activité VTC. Dans un souci de cohérence et pour les mêmes raisons, la CGT demande que cet article 5 exclut également le cumul Taxi/ LOTI.
VTC
- Tarification horaire (article 7, section 1, de la proposition de loi)
L’article L3124-1 prévoit pour les VTC le choix dune tarification au temps. Cela ne fera qu’introduire de la confusion dans l’esprit du consommateur car les VTC auront donc la possibilité d’avoir un « compte-heure ». Cette forme de tarification se rapproche dangereusement de celle des taxis. Pour éviter cela, le projet de loi devra préciser que la tarification horaire ne sera possible que quand la prestation initiale et unique dépassera les trois heures.
- Inscription des exploitants VTC (article 7, section 2, de la proposition de loi)
L’article L3124-3 ne semble pas envisager une régulation des inscriptions VTC. Il faudrait pourtant envisager sérieusement de geler les délivrances car personne aujourd’hui n’a de visibilité sur la viabilité économique des entreprises de transport, ce que reconnaît M. Thévenoud dans son rapport.
Dans un souci de transparence, il semble indispensable que le gestionnaire du registre effectue un recensement des inscriptions existantes ainsi que les véhicules qui s’y rapportent.
Il conviendrait également, ce que ne semble pas prévoir la proposition de loi, qu’une inscription sur ce registre corresponde à un véhicule unique. De même, pour des raisons de sécurité évidente liées à l’activité de transport de personnes sur la voie publique, cette loi devrait permettre aux forces de l’ordre de savoir en temps réel quelle voiture est exploitée par quel chauffeur. Le taxi est par exemple soumis à ces obligations et cela est tout à fait légitime.
Sur la capacité financière enfin, elle devra être proportionnelle au nombre de véhicules.
- VTC et voie publique (article 8, art. L3120-1 de la proposition de loi)
Les VTC n’ont pas à occuper la voie publique sans être réservés. Ce n’est pas la « maraude » qui est propre au taxi mais le droit de stationner ou de circuler sur la voie publique en quête de clients. Or, dans la formulation actuelle de l’article L3120-1, les VTC pourront continuer à faire comme les taxis, c’est-à-dire occuper la voie publique sans réservation malgré nos nombreux avertissements au député Thévenoud sur ce point essentiel. M. Thévenoud semblait pourtant avoir pris conscience de cette problématique dans son rapport :
« Une modification législative est nécessaire pour rendre possible le contrôle de la maraude et du racolage des VTC. Dans la capitale ou aux abords des salons et festivals, des VTC sont stationnés en attente de clientèle. Ce stationnement de VTC en attente de clientèle doit pouvoir être sanctionné.
L’article L231-3 du code du tourisme disposait que « les voitures de tourisme avec chauffeur ne peuvent ni stationner sur la voie publique si elles n’ont pas fait l’objet d’une location préalable, ni être louées à la place », ce qui permettait un contrôle des véhicules en stationnement sans réservation.
Il a été modifié par la loi du 17 mars 2014 (art 134), qui durcit les sanctions mais rend aussi le contrôle plus difficile : les VTC « ne peuvent ni stationner, ni circuler sur la voie publique en quête de clients ».
La quête de clients est en effet particulièrement difficile à démontrer pour les forces de l’ordre.
Cette modification est dommageable, puisqu’elle rend plus difficile le contrôle…. » (extrait du rapport Thévenoud, , paragraphe 2.5.1, p48)
Le député prévoyait donc de revenir à l’ancienne formulation (proposition n°20), ce qui n’a pas été fait et cela met en péril cette loi car vous devez savoir qu’un VTC est en permanence en quête de client à travers ses diverses applications smartphones.
Ce qu’ils manquent : les dispositions générales devront aussi intégrer absolument les points suivants afin que cette proposition de loi ne reste pas sans effet :
1) Il faut absolument que cette loi prévoie le retour des VTC non réservées à leurs sièges sociaux (qui devront être clairement définis lors de leurs immatriculations). Attention, il ne s’agit pas de créer des « stations VTC », mais bien de faire respecter l’article L231-3 (« ni circuler, ni stationner sur la voie publique »).
2) Les VTC devront être identifiés au moyen d’un dispositif inamovible (plaque vissée par exemple sur la plaque d’immatriculation ou autocollant indécollable…) et devront être considérées en service en permanence. Sans cela, les forces de l’ordre ne pourront pas faire appliquer la législation.
3) Enfin, nous vous demandons d’étendre la géolocalisation au transport de personnes (VTC, LOTI, etc.), non pas à des fins commerciales mais dans un souci de sécurité et de contrôle. La géolocalisation de ces véhicules (couplée avec la connaissance de leur état : libre ou réservé) sera le seul moyen efficace de contrôler le respect de la réglementation et de sanctionner efficacement leurs infractions éventuelles.
- VTC et geolocalisation (article 8, point 1° du III de l’article L3120-1)
Ce point de la proposition de loi semble d’ailleurs légitimer le fait que les VTC stationnent sur la voie publique sans réservation. Il interdit en effet seulement aux clients de connaitre la position du VTC mais nullement au VTC de stationner sur la voie publique, sans être réservées, comme un taxi en somme. Alors que la loi est censée leur interdire le stationnement ou la circulation, paradoxalement, cet article semble envisager cette éventualité avec en plus la capacité pour ces VTC de recevoir des courses dans cette situation.
Ce qu’il manque : on retrouve ici le fait que la notion de « réservation préalable » est détournée, non seulement de son sens, mais aussi de l’esprit de la loi. La notion de réservation induit une durée entre la commande d’un service et sa consommation ou sa mise à disposition. Une commande n’est pas une réservation et d’ailleurs certaines de ces sociétés déclarent ouvertement ne pas accepter de « réservation à l’avance ». La loi devra préciser clairement ce qu’est une réservation.
La loi doit donc être plus claire et doit affirmer haut et fort que les VTC ne peuvent pas se prévaloir des pratiques des taxis sans en assumer les devoirs. Nous restons vigilants quant à la suite que vous donnerez à nos observations, et nous ne manquerons pas d’en informer les chauffeurs de taxis qui sont très inquiets à juste titre de la situation crée par la néfaste loi 2009-888 du 22 juillet 2009. Les taxis comptent sur cette nouvelle majorité pour rétablir l’équilibre et la justice sociale.