06/07/2022 Pénurie de (taxis) cerveaux ? Vers une hausse du nombre de taxis ?

blue and green peacock feather

Les chauffeurs VTC eux-mêmes revendiquent un numerus clausus car ils ont vécu le surnombre d’acteurs et beaucoup ne s’en sont pas remis. Il est quand même extraordinaire que des organisations de taxis fassent la démarche inverse en revendiquant une augmentation continue du nombre de taxi !

 

Pénurie/spéculation mondiale

La pénurie, le quotidien pour des milliards d’habitants depuis des siècles, refait surface dans nos sociétés occidentales. La pénurie est de retour ! Ce mot, nous avions failli l’oublié tant le système capitaliste et son avidité inhérente favorisent l’accumulation de richesses de manière indécente, en dépit du bon sens social et écologiste notamment. Car nous savons que cette richesse se répartit très inégalement et que peu de personnes concentre l’essentiel des richesses produites dans le monde. Ces inégalités s’aggravent d’année en année.

 

Ce mot « pénurie » est donc de retour à la une de tous les médias : pénurie de composants électroniques, pénurie de papier, pénurie de véhicules neufs avec des délais d’attente supérieurs à l’année, pénurie de moutarde, d’huile, et, peut-être bientôt, pénurie de gaz. Certaines pénuries sont bien sûr le fruit de spéculations comme le démontre actuellement le marché du pétrole. Où est la fameuse capacité du marché à s’autoréguler vanté par les valets de ce système ? La loi du marché une fois de plus fait la démonstration qu’elle n’est qu’une fiction au service des riches.

 

Mais ces difficultés, réelles ou fruits de spéculations, ne touche pas que les marchandises. La crise sanitaire et l’inflation galopante auraient également fait prendre conscience à de nombreux travailleurs précaires que leurs conditions ne sont plus tenables. Il y aurait donc également une pénurie de travailleurs. Des secteurs entiers, particulièrement réputés pour exploiter sans scrupule leurs travailleurs se trouvent aujourd’hui, selon le patronat larmoyant, démunis de main-d’œuvre corvéable. Les secteurs qui manquent de bras sont nombreux et on entend régulièrement citer  la restauration, l’hôtellerie, les compagnies aériennes low cost et même le joyau de la nouvelle économie que sont, parait-il, les VTC. Nous savons qu’en fait les VTC sont de simples contrefaçons bas de gamme du taxi qui se font exploités par les plateformes. Ces secteurs connaissent donc une pénurie de travailleurs prêt à travailler beaucoup d’heures en étant payés très peu. Pour la CGT c’est le juste retour de bâton de l’exploitation de ces travailleurs.

 

Une hirondelle ne fait pas le printemps

Et le taxi dans tout ça ? Si le taxi semble retrouver ces dernières semaines de juin 2022 les niveaux d’activité antérieurs à la crise Covid, rappelons que les statistiques fiables sur le taxi font toujours défaut malgré les demandes répétées de la CGT-Taxis. Il est donc difficile de faire des comparaisons ou même un état des lieux puisque les outils pour mesurer notre activité n’ont pas été mis en place par les pouvoirs publics.

 

Ce qui est certain, c’est que l’embellie de quelques semaines ne préfigure en rien les mois et années à venir. Or, certains, doués certainement d’un don de voyance rare, prévoient une embellie économique sur le long terme et commence à revendiquer la hausse du nombre de licence taxi ! Certains, comme les dirigeants de la G7, se plaignent d’une pénurie de taxis ! Le mot est lâché !

 

Pour reprendre une expression populaire pleine de bon sens, rappelons à ces « visionnaires » qu’une hirondelle ne fait pas le printemps ! Une augmentation du nombre de taxis ne peut se fier à une activité mesurée (par quoi ? par qui ?) partiellement sur quelques semaines.

 

L’équilibre économique du secteur

Notre nombre déterminera en effet nos conditions de travail futur et nos revenus sur les années à venir. Nos conditions de travail d’ailleurs, parlons-en ! Aujourd’hui nous n’avons pas besoin de boule de cristal pour dire qu’elles ne cessent de s’aggraver : la mise en concurrence avec les contrefaçons, la dégradation des conditions de circulation, les verbalisations outrancières, le travail à perte du fait de forfaits qui n’ont rien à faire dans le taxi, le prix de la location toujours en hausse… Historiquement, il faut se souvenir que c’est l’échec de la libéralisation de notre secteur dans les années 1920 qui a amené à la conclusion qu’il fallait que le taxi soit régulé par un numerus clausus, seul garant du partage de la recette et d’un service digne au public.

 

D’ailleurs, qu’elle est la principale revendication des VTC depuis plusieurs années ? L’obtention d’un numerus clausus comme les taxis ! Ils ont très bien compris que sans cela ils sont condamnés à se précariser et à être dépendant éternellement des entreprises de mise en relation. Les plateformes se soucient peu, nous le savons, des conditions de travail des chauffeurs, que ce soit dans le VTC ou dans le taxi. Rappelons que la principale plateforme du taxi, la G7, est aussi à l’origine de la location dans le taxi, système inégalitaire qui exploite les conducteurs de taxis jusqu’à l’usure. Ils se trouvent que c’est aussi cette plateforme qui s’épanche dans les médias pour réclamer une hausse du nombre de taxis.

 

Les intérêts des plateformes ne sont pas ceux des conducteurs ni des usagers !

La G7, comme UBER, a en effet intérêt à maximiser sa rente en augmentant son nombre de chauffeurs. Une société capitaliste par essence est en effet condamnée à croître d’année en année. Une stagnation de son chiffre d’affaires serait suicidaire. La seule solution pour elle est donc de réclamer une hausse du nombre de taxis ! Pour la CGT-Taxis, ces intérêts privés ne doivent pas interférer, ou pire, diriger la politique des pouvoirs publics en matière de taxis. C’est l’intérêt collectif qui doit primer tout en s’assurant des bonnes conditions de vie et de travail des chauffeurs de taxi. Il semble nécessaire de rappeler ici au pouvoir public que le taxi ne peut pas pallier les défaillances des transports publics collectifs causés par la casse des services publics.

 

La CGT-Taxis est bien sûr opposée à une hausse du nombre de taxi qui ne serait pas fondée sur une étude économique digne de ce nom intégrant les conditions de travail et de vie des conducteurs de taxi. Encore une fois, les chauffeurs VTC eux-mêmes prennent pour modèle le taxi et revendiquent le numerus clausus car ils ont vécu le surnombre d’acteurs et beaucoup ont abandonnés cette activité. Il est quand même extraordinaire que cela n’est pas servi de leçon puisque les organisations de taxis font la démarche inverse en revendiquant une augmentation permanente du nombre de taxi !

 

Une augmentation qui ne serait fondée que sur du vent (ou sur la courbe de profit des plateformes taxis ?), sans qu’aucune étude économique et sociologique s’enquière de nos conditions de vies ne serait pas acceptable ! Ces conditions aujourd’hui ne sont clairement pas réunies. Rappelons de plus que nous n’avons aujourd’hui aucune visibilité à court terme sur l’avenir économique de la France et du monde. Les économistes s’accordent aujourd’hui à reconnaître leur incapacité à faire des prévisions à quelques mois tant les facteurs d’incertitudes sont multiples : guerre, pandémie, inflation, hausse des taux,…Evitons donc les analyses hasardeuses et subjectives et travaillons à améliorer l’existant avant de s’engager dans un processus irréversible.

 

Pour la CGT-Taxis il y a de nombreux chantiers prioritaires qui doivent être mis en place de manière urgente pour assainir la profession tout en améliorant les conditions de vie des chauffeurs et donc la qualité de service : mettre fin à la location, abroger le forfait, favoriser la création de voie réservée bus-taxi, réorganisation totale des gares et des aéroports… Pour mener à bien ces luttes, chaque chauffeur doit s’investir au quotidien.

 

Le secrétariat des Cochers Chauffeurs CGT-Taxis