Déclaration préalable de la CGT-Taxis à la commission locale du transport particulier de personne de Paris

Cette commission, selon l’article D3120-22 du code des transports, est censée établir un rapport de ses activités. La CGT-Taxis n’a jamais eu connaissance de la rédaction d’un tel rapport sauf à considérer que le compte rendu des interventions des uns et des autres constitue un rapport.

Dans la mesure où notre zone d’activité concentre la majeure partie de ce que vous appelez T3P, nous nous demandons à quoi peuvent donc servir ces réunions puisque aucun rapport n’en ressort.

Il nous semble surtout que les questions fondamentales ne sont pas abordées dans ces commissions alors qu’elles sont pourtant prévues par le décret 2017-236.

Pour faire simple, aucun constat n’est tiré de la loi 2009-888 dite loi Novelli. Nous en restons malheureusement à tenter de traiter uniquement les conséquences de cette loi sans en analyser les causes profondes.

La CGT-Taxis tient donc à réaffirmer que cette loi est un échec aux conséquences désastreuses pour la plupart des acteurs déjà existants bien sûr, comme les taxis ou les grandes remises mais aussi pour les nouveaux acteurs crées par cette loi, ce qui est paradoxal.

Ce sinistre destin, les Cochers Chauffeurs CGT-Taxis l’avaient malheureusement prévu dès la promulgation de cette loi en 2009. Cela non pas parce que nous sommes les plus intelligents, mais simplement car nous connaissons notre passé.

Car ce libéralisme sauvage et sans règle a déjà existé dans le taxi au début du 20e siècle, c’était l’ère de la marque libre. Le nombre de taxi s’était multiplié, comme aujourd’hui les VTC, mais très vite, toute la profession s’était paupérisée et cela avait détruit le secteur.

Les pouvoirs publics de l’époque, avec les luttes de notre syndicat, ont mis fin à cette période sombre où le taxi avait été détruit par ce libéralisme. La loi de 1937 avait ainsi permis d’instaurer un équilibre économique dans le secteur, seul garant d’une qualité de service.

Monsieur Sarkozy avec le soutien de Monsieur Attali et déjà de Monsieur Macron n’a donc rien inventé. Ils n’ont fait que rétablir le retour à un ordre moyenâgeux où une minorité asservit la majorité des acteurs. Cela se fait également au détriment des clients et de l’ensemble de la société.

Les taxis se sont bien sûr retrouvés les premiers spoliés et nous subissons aujourd’hui la présence d’acteurs qui exercent le même métier sans en subir les contraintes. Ce sujet de la spoliation n’est pas traité par cette commission.

Ces nouveaux acteurs, les VTC, restent aujourd’hui des contrefaçons de taxi car sous la pression et la protection des plateformes, ils passent la majeure partie de leur temps en attente de clientèle sur la voie publique, ce qui est légalement le propre des taxis. Ce point-là n’est pas traité par cette commission.

Mais ces nouveaux acteurs se trouvent également paupérisés pour plusieurs raisons : leur faible formation, leur nombre illimité, et bien sûr, leur exploitation sans scrupule par des entreprises, qui sous prétexte d’être « numériques », se croient tout permis. Pour combattre cet appauvrissement, plusieurs états américains viennent d’ailleurs de requalifier les travailleurs de ces plateformes en salariés. Que fait le gouvernement français ? Il tente lui de protéger les plateformes avec l’article 20 de la LOM (devenu depuis l’article 44) qui n’apportera rien aux chauffeurs !

Alors que sur leur terre et à peu près partout en Europe ces plateformes sont combattues par les pouvoirs publics et par les tribunaux, elles sont ici accueillies par Monsieur Macron comme des bienfaitrices !

Ces plateformes seraient le seul avenir des jeunes des quartiers populaires ! Il est bon de rappeler d’ailleurs que nous, taxis, sommes également issus de ces mêmes quartiers populaires et des zones rurales ou urbaines sinistrés de l’économie françaises.

Le nombre de VTC et l’opacité entretenue par les plateformes sur leurs pratiques les rendent en plus difficilement contrôlables par l’administration. Il semble également qu’il y ait un véritable frein politique au contrôle de ces plateformes puisque les textes amorçant ce genre de contrôle sont bloqués on ne sait où depuis 3 ans !

Cela entraîne inévitablement des dérives graves pour la clientèle de ces services en termes de sécurité.

Une campagne sur les réseaux sociaux, dans les médias dénonce ainsi des agressions sexuelles qui auraient eu lieu dans des VTC et qui auraient été couvertes par les plateformes ! Londres vient de prendre ses responsabilités et a interdit à la plus grosse plateforme d’exercer pour ces raisons de sécurité. Cette commission, aujourd’hui, devrait en faire de même, mais malheureusement, nous n’avons aucun pouvoir, d’où nos interrogations sur son utilité.

Pourtant, il est fort à parier que les failles constatées de l’autre côté de la Manche sont les mêmes qu’ici !

Enfin, une ONG vient de mettre en lumière une autre conséquence néfaste de cette loi Novelli, conséquence toujours liée au nombre incontrôlé des VTC, à savoir la pollution que ces véhicules créent dans nos agglomérations. Que compte faire cette commission sur ces graves dangers ?

 Nous le voyons, la déréglementation du taxi a eu les effets que la CGT Taxis dénonce depuis toujours. La France et son gouvernement semblent être le dernier bastion de ce capitalisme sauvage et sans scrupule dont ces entreprises du numérique se revendiquent clairement.

Le taxi et le transport individuel de personne de manières générales ne peuvent pas être ni un transport de masse qui remédierait au désengagement de l’État d’une véritable politique des transports publics, ni une solution au chômage de masse lié là encore à une désindustrialisation propre à la France.

Le taxi et d’autres transports individuels de personne qui reste à définir de manière générale ne peuvent être qu’un complément au transport public collectif. C’est un enjeu social et environnemental. La CGT-Taxis demande donc à cette commission de travailler sur les causes de nos problèmes et non plus sur les conséquences qui, nous le voyons bien, ne seront jamais maîtrisées par une administration privée de moyens.

Paris, le 28 novembre 2019